Les surdoués sont globalement plus perfectionnistes que la moyenne, ce qui n’est pas une bonne nouvelle. Bien que le perfectionnisme soit valorisé dans la vie professionnelle, il est souvent associé à différentes formes de souffrance mentale dont le stress et l’anxiété. Il est également source de procrastination : il est très difficile au perfectionniste de réaliser une tâche puisqu’elle ne sera jamais à la hauteur de ses attentes.
Commençons par définir le perfectionnisme. C’est un niveau d’attentes et d’exigence particulièrement élevé qui prend trois formes :
- Le perfectionnisme envers soi ou « Je dois être parfait ». Cette forme de perfectionnisme peut constituer un levier de motivation, par exemple pour un sportif de haut niveau, mais elle est aussi un terreau de burnout : je m’épuise à chercher à atteindre un idéal inatteignable et je me tiens un discours négatif de type « je suis vraiment nul ».
- Le perfectionnisme hérité de notre environnement ou « Les autres attendent de moi que je sois parfait ». On en voit une illustration dans les réseaux sociaux, où chacun poste ce qu’il pense être la meilleure version de soi, en train de faire du sport, de réussir une recette, de s’apprêter à sortir dans son plus beau costume, etc. Nous pensons que notre entourage attend de nous que nous soyons parfait et nous nous efforçons de répondre à ces attentes. Là aussi, l’épuisement et la déprime guettent.
- Le perfectionnisme que nous imposons aux autres ou « Je suis exigeant envers moi-même, donc je le suis aussi envers les autres ». Tout comme le perfectionnisme envers soi, cette forme peut, à dose raisonnable, contribuer à développer les autres, soit finir par produire des formes de harcèlement et de souffrance.
Vous avez probablement, à des degrés différents, ces trois formes de perfectionnisme en vous. Est-ce grave ? Oui, si cela transforme votre vie et celle de votre entourage en enfer. Non, si vous prenez conscience des dangers du perfectionnisme et que vous lui trouvez des alternatives plus équilibrées.
Trois possibilités s’offrent à vous :
1. Chercher une forme saine de perfectionnisme.
Dans un ouvrage précédemment présenté ici, Clotilde Poivilliers encourage les surdoués à remplacer le perfectionnisme par l’optimalisme[1] : Elle le définit comme « un perfectionnisme sain, qui vient de « optimum » signifiant « le plus favorable pour obtenir un but déterminé. (…) « L’optimaliste envisage toujours de réussir ce qu’il entreprend mais il tient compte du contexte et de ses propres facultés. Il connaît ses limites et ses défauts qu’il considère comme des points d’amélioration, mais également ses qualités qu’il sait optimiser pour en tirer parti. Avec discernement, il voit et accepte la réalité telle qu’elle est. S’il vit un échec, il le considère comme une expérience pour s’améliorer. Si le résultat escompté n’est pas parfait, il l’accepte. » Cherchez à faire le mieux possible, puis lâchez prise. Vous avez fait votre part !
2. Assumer pleinement sa recherche de la perfection et en faire une quête.
Vous pouvez aussi choisir de faire de la recherche de la perfection un objectif en soi. Cette option n’est évidemment pas la plus facile, mais elle peut être viable si vous prenez quelques précautions :
- Limitez cette quête à un domaine précis pour éviter qu’elle n’envahisse toute votre vie. L’exemple qui vient le plus souvent en tête est celui de l’artisan : il peaufine son geste, il cherche le beau, il travaille même les parties qui ne seront pas visibles, mais son atelier peut être désordonné et son jardin en friche. Il ne cherchera pas à être parfait dans tous ses domaines de vie.
- Exercez une activité qui vous laisse suffisamment d’autonomie. Il peut être satisfaisant pour un programmeur d’écrire un « beau code » épuré, mais cela n’est pas toujours compatible avec un travail en équipe ou avec des délais très contraints.
- N’imposez pas cette quête à votre entourage pour ne pas vous transformer en tyran.
3. Adopter le principe de Pareto et s’en tenir aux 80 % de résultats.
Cette option est difficile à entendre pour les perfectionnistes ! Selon le principe de Pareto, 20 % des efforts que vous produisez vous permettront d’atteindre 80 % du résultat. Il vous faut donc repérer les actions les plus pertinentes à mener, celles qui ont le plus fort effet de levier. En revanche, les 20 % qui vous manquent pour atteindre les 100 % de réalisation vont nécessiter 80 % de vos efforts ! Vous l’avez probablement déjà vécu, conclure un projet est souvent ce qui coûte le plus en temps et en ressources. D’ailleurs, certains projets ne finissent jamais. Est-ce un drame ? Peut-être pas ! Peut-être pouvez-vous vous contenter de 80 % du résultat ?
Bien sûr, cela n’est pas recommandable dans tous les domaines : personne ne souhaite être opéré par un chirurgien qui se contenterait de 80 % du résultat, mais posez-vous a minima ces deux questions :
- Dans votre domaine d’activité, y a-t-il des tâches que vous pouvez vous permettre de ne pas achever sans créer de risque opérationnel ?
- Les 20 % manquants ont-ils une vraie valeur ajoutée ? Faut-il absolument aller les chercher ?
[1] concept qu’elle emprunte elle-même à Tal Ben-Shahar, dans son livre “L’Apprentissage de l’imperfection” (éd. Belfond, 2010)
Recommandation de lecture
Un grand classique !
Les ouvrages de Christophe André ne m’ont jamais déçue. Certes, il a tendance à se répéter, mais ce sont des messages que l’on a besoin d’entendre et de réentendre. “Imparfaits, libres et heureux” est l’antidote au perfectionnisme dans ce qu’il peut avoir de nocif. Le propos de ce livre aide à retrouver une forme de légèreté et nous autorise à être nous-même, avec nos qualités et nos défauts.
Citation inspirante
Face à la gamme de nos maux psychologiques, l'optimaliste n'est certes pas la panacée, mais la qualité de vie dont jouit l'optimaliste dépasse de loin celle du perfectionniste. Tal Ben-Shahar